LE MANIFESTE
Si les murs de nos ateliers devenaient soudainement transparents,
vous verriez des artisans médiévaux dont le labeur est dur, mais solide.
Vous penseriez que vous vous êtes trompés de siècle,
car vous verriez des gens pour lesquels la beauté n’est pas un caprice de la nature
mais le coup d’œil juste du maçon.
Vous seriez étonnés de savoir comme on puise peu dans le présent
mais combien l’on trouve dans le passé.
Ici on ne veut pas nourrir la raison, mais le cœur et l’œil.
Ici, on croit qu’à notre époque pressée l’artiste doit réfléchir avec lenteur.
Sans agitation.
Car le beau se fait sans hâte.
Ici, on cherche l’inspiration à l’Ouest aussi bien qu’à l’Est, mais plus souvent à l’Est.
Nous ne somme pas nés pour la lutte, nous ne voulons pas changer le monde,
mais nous ne voulons pas non plus que le monde nous change.
Erasme nous murmure : «Il est plus sûr de dormir dans le trèfle,
car les serpents ne se cachent jamais dans cette herbe».
Et le sol de nos ateliers nous le couvrons de trèfle.
Nous avons les nerfs sensibles et la peau fine.
Mais nous savons qu’ils doivent s’affiner encore et encore,
et seulement alors nous réussirons à faire quelque chose de bien.
Nous avons des muscles d’acier et le cuir épais de l’âne.
Nous savons qu’ils doivent devenir encore plus rudes et résistants,
et seulement alors nous réussirons.
L’Âne Noir